mercredi 28 mars 2012

Du roman au français

Le cantilène de Sainte Eulalie écrit au Xème siècle par un inconnu a une nette prédominance latine. Voici le texte roman suivi de la traduction française :



Buona pulcella fut Eulalia.
Bel avret corps, bellezour anima.
Voldrent la veintre li Deo inimi,
Voldrent la faire diaule servir.
Elle no'nt eskoltet les mals conselliers
Qu'ellle De o raneiet, chi maent sus en ciel,
Ne por or ned argent ne paramenz
Por manatce regiel ne preiement.
Niule cose non la pouret omque pleier
La polle sempre non amast lo Deo menestier.
E por o fut presentede Maximiien,
Chi rex eret a cels dis soure pagiens.
Il li enortet, dont lei nonque chielt,
Qued elle fuiet lo nom chrest iien.
Ell'ent adunet lo suon element:
Melz sostendreiet les empedementz
Qu'elle perdesse sa virginitét;
Por os furet morte a grand honestét.
Enz enl fou lo getterent com arde tost.
Elle colpes non avret, por o nos coist.
A czo nos voldret concreidre li rex pagiens.
Ad une spede li roveret tolir lo chieef.
La domnizelle celle kose non contredist:
Volt lo seule lazsier, si ruovet Krist.
In figure de colomb volat a ciel.
Tuit oram que por nos degnet preier
Qued auuisset de nos Christus mercit
Post la mort et a lui nos laist venir
Par souue clementia.


Traduction

Eulalie était une bonne jeune fille.
Elle avait le corps beau et l'âme plus belle encore.
Les ennemis de Dieu voulurent la vaincre;
Ils voulurent lui faire servir le Diable.
Elle n'écoute pas les mauvais conseillers
qui lui demandent de renier Dieu qui demeure au ciel là-haut,
Ni pour de l'or, ni pour de l'argent, ni pour des bijoux
Ni par la menace ni par les prières du roi.
Rien ne put jamais la faire plier ni amener
La jeune fille à ne pas aimer toujours le service de Dieu.
Et pour cette raison elle fut présentée à Maximien
Qui était en ces temps-là le roi des païens.
Il lui ordonna, mais peu lui chaut,
De renoncer au titre de chrétienne.
Elle rassemble sa force.
Elle préfère subir la torture plutôt
Que de perdre sa virginité.
C'est pourquoi elle mourut avec un grand honneur.
Ils la jetèrent dans le feu pour qu'elle brûlât vite.
Elle n'avait pas commis de faute, aussi elle ne brûla point.
Le roi païen ne voulut pas accepter cela.
Avec une épée, il ordonna de lui couper la tête.
La jeune fille ne protesta pas contre cela.
Elle veut quitter le monde; elle prie le Christ.
Sous la forme d'une colombe, elle s'envole au ciel.
Prions tous qu'elle daigne intercéder pour nous,
Afin que le Christ ait pitié de nous
Après la mort et nous laisse venir à lui
Par sa clémence.


Quatre cent ans plus tard François Villon écrit sa "Ballade des pendus" dans un "français" qui se rapproche plus du notre :


Frères humains qui après nous vivez,
N'ayez les cuers contre nous endurcis,
Car, se pitié de nous povres avez,
Dieu en aura plustost de vous mercis.                                    
Vous nous voiez cy attachez cinq, six :
Quand de la char, que trop avons nourrie,
Elle est pieça devoree et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poudre.
De nostre mal personne ne s'en rie ;
Mais priez Dieu que tous nous vueille absoudre !



4 commentaires:

  1. j'avais découvert ce texte à l'occasion d'une exposition dans une église de la région consacrée à cette Sainte et qui relatait son histoire, cela me rappelle des souvenirs...
    Bonne journée!

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  2. Merci pour la visite. J'ai toute une série de poèmes du Xème au XIIIème siecle en original et traduction. Ce texte m'a donné l'occasion d'approfondir l'histoire de cette martyre.

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  3. merci Caphadock, j'aime bien venir ici car j'y voyage avec surprise en des temps différents

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