Dans un journal, une étude scientifique du vélin par Hervé Morin. Au XIIIe
siècle, l'Europe s'est entichée de " bibles de poche ", des
ouvrages manuscrits dont les pages étaient d'une -finesse admirable. Peu
décorées, elles n'ont rien d'ostentatoire, mais visent à aider les religieux à
répandre la bonne parole. " Rien qu'à Paris, elles ont été produites à 20
000 exemplaires ", note -Annelise
Binois (laboratoire ArScAn – Archéologies et sciences de l'antiquité, UMR 7041, Nanterre). Zoo archéologue et
vétérinaire, elle cosigne une étude, -publiée le 23 novembre dans les PNAS, visant à déterminer
la provenance animale du parchemin.
Un
exergue de Shakespeare, -inhabituelle dans un article scientifique, résume le
mystère qui entoure ces feuilles si délicates : " Le parchemin n'est-il
pas fait de peau de mouton ? ", s’interroge Hamlet. " Oui, mon
seigneur, et de peau de veau aussi ", lui répond Horatio. Les spécialistes
s'interrogent toujours sur l'origine de ce fameux vélin, dont l'épaisseur peut
n'être que de 0,03 millimètres.
Provient-il de veaux mort-nés, comme le laissent entendre la chronique et
l'étymologie, veel désignant le veau en ancien français ? Ou bien de petits
animaux, comme le -lapin ou l'écureuil ?
Préparation de la peau
Pour
en avoir le cœur net, une équipe internationale coordonnée par Sarah Fiddyment
(université de York, Royaume-Uni) a collecté 72
de ces bibles et 293 manuscrits
de la même époque, dans trois pays (France, Italie, Royaume-Uni), pour analyser
la composition des parchemins. Mais pas question, pour les -conservateurs de
ces précieuses reliques, de céder d'un pouce sur leur intégrité. "
Habituellement, on attend qu'un exemplaire soit restauré pour récupérer des
-chutes, rappelle Annelise Binois. Cette fois, nous avons utilisé une technique
non destructive. "
La bibliothèque du musée Condé au château de Chantilly et son impressionnante collection de vieux parchemins
Fragments
de collagène
Il
s'agit tout bonnement d'une gomme en PVC, stérilisée, qui par force
électrostatique arrache des fragments de collagène sans abîmer les manuscrits.
" Les -conservateurs eux-mêmes l'utilisent pour nettoyer les vélins
", souligne Annelise Binois. Les -rognures sont ensuite passées dans un
spectrographe de masse qui, pour un coût modique, -distingue les séquences des
protéines de collagène propres à chaque espèce. Cette technique a été préférée
à des analyses ADN, plus coûteuses, dont chacune aurait nécessité de prélever
5 milligrammes de parchemin.
En 1411 jusqu'à lors assez austère s'illumine telle "Les très riches heures du duc de Berry"
Verdict
? Il n'y avait pas de peau de lapin ou d'écureuil dans les échantillons,
seulement les trois espèces classiques : en France en majorité du veau, mais
aussi des chèvres et des moutons, correspondant aux animaux élevés dans la
région de fabrication des bibles.
Ces manuscrits et dessins de plus de 500 ans ont garde une fraîcheur remarquable.
L'origine
" exotique " du vélin étant écartée, restait la question de l'âge des
animaux utilisés, car le sacrifice de jeunes veaux aurait constitué une
pratique d'élevage guère soutenable. En fait, " la mortalité périnatale,
dont les registres de l'époque montrent qu'elle était de 10 % à 20 %, suggère qu'il n'était pas impossible
de trouver suffisamment de veaux mort-nés ou morts moins d'un mois après la
naissance pour produire ces vélins ", indique Annelise Binois. Mais les
chercheurs pensent que des techniques d'amincissement des peaux, qui restent à
redécouvrir – ponçage, division dans l'épaisseur ? – auraient aussi été
utilisées sur des animaux moins jeunes.
C'est aussi l'histoire de la vie de ce temps là
Ces
hypothèses nécessiteront des études complémentaires : la recherche de quatre
protéines " périnatales ", qu'on ne trouve qu'au moment de la
naissance des veaux, est restée infructueuse.
vélin peau de lapin ça c'est une chimère !!!
RépondreSupprimerOu peau de veau mais la fin de l'étude montre que rien n'est acquit
SupprimerLes chimères scientifiques et religieuses avaient la par du lion en ces temps là mais a t-on changé aujourd'hui ?
Une enquête passionnante, fort bien illustrée. Bravo !
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