En allant visiter l’île de
Sein je suis passé tout près de ces intrépides marins pêchant le bar.
Le bar de ligne ou bar
sauvage (en Provence le loup) possède un corps fusiforme argenté sur les côtés
et gris argenté à bleuâtre sur le dos, des petites écailles (la ligne latérale
en comporte de 62 à 74), deux nageoires dorsales distinctes (la première avec 8 à 10 épines, la seconde avec
une épine et 12 ou 13 rayons mous), une nageoire anale munie de 3 épines et de 10 ou 12 rayons mous, un opercule pourvu sur son
bord d'une tache noire diffuse et de 2 épines plates, une nageoire caudale modérément fourchue. Il peut atteindre 1 m de long pour un poids de 12 kg,
mais des spécimens de 50 cm pour 1 kg sont plus courants. Mangeurs de
crustacés ils se régalent dans les remous au milieu des rochers à fleur d’eau.
Les bateaux, pour la plupart basés à Audierne ne sont pas
plus grands que nos pointus de Provence avec de la place pour le pêcheur, seul
devant d’une main tenir sa cane pour pêcher et de l’autre tenir la barre et
l’accélérateur de moteur surpuissant pour tenir le bateau tout proche des
rocher au milieu des courants et de vagues venant dans tous les sens
Par
Marc Epstein, publié le 06/01/2014
Entre les vagues du
raz de Sein, les ligneurs bretons traquent leur proie et s'astreignent à
respecter des techniques de pêche qui préservent la qualité de la chair du bar
sauvage.
Sous le défilé des nuages, le bateau
tangue et roule à la surface de la mer, vers l'avant puis l'arrière, comme un
bouchon de liège. Au large de la pointe de Bretagne et à quelques dizaines de
mètres du phare de la Vieille, surgi des rochers, imposant et austère, le
chahut des flots et les tourbillons d'écume donnent le vertige.
Dans le raz de Sein, l'un des endroits les
plus beaux, les plus sauvages et les plus dangereux du littoral, les courants
de la Manche se jettent dans ceux de l'Atlantique. Au
milieu des creux, une vingtaine de pêcheurs viennent débusquer un poisson
recherché pour sa chair ferme et son goût subtil, mais réputé insaisissable, et
de plus en plus rare : le bar.
On les appelle les "ligneurs". Sur de petits bateaux, longs de 8 ou 10 mètres, un fil de
pêche dans une main et la barre dans l'autre, ils se faufilent entre les vagues
et traquent leur proie dans les remous, au plus près des rochers. Pas question
de lancer un filet : les fonds sont trop peu profonds. Impossible, aussi, de travailler à
plusieurs : debout dans son embarcation, ballotté par les flots, chaque ligneur
doit être libre de ses mouvements, manoeuvrer en permanence et jouer du moteur
surpuissant pour échapper aux déferlantes. Il y a, dans cette navigation,
quelque chose du rodéo.
Une exception à l'heure de la mécanisation. Avec leur image de cow-boys des mers,
solitaires et virils, les ligneurs du raz de Sein suscitent l'admiration dans
le milieu de la pêche marine. Une pointe de jalousie, aussi. Télégéniques et
célébrés par les médias, ces maîtres artisans sont porteurs de rêve, d'autant
que les meilleurs d'entre eux disposent de revenus confortables.
Le bon
ligneur, lui, est un chasseur à l'affût : dans sa traque solitaire du bar,
poisson noble par excellence, il ruse avec sa proie et interprète en permanence
les éléments qui l'entourent afin de l'approcher au plus près. C'est
fascinant.
A bord de
son bateau, Altaïr, soulevé par les flots, Ronan Thomas ne
cesse de tourner la tête dans tous les sens, à la manière d'un animal. Il
observe la direction du vent, les changements de luminosité, la surface de
l'eau, la forme des vagues... Les nuées de goélands argentés et les glissades
au fil de l'air des fous de Bassan, aux ailes longues et pointues, apportent,
eux aussi, des renseignements précieux :"Les oiseaux sont nos amis,
explique-t-il. Ce sont eux qui, souvent, nous indiquent où est le poisson."
"Tous
les ans, nous devons acheter de nouveaux leurres, précise-t-il. A défaut, les
poissons reconnaissent le subterfuge et pressentent le danger."
Le bar a
un appétit de carnassier, d'où le nom de "loup" qui lui est donné au
sud de la Loire. Avec son corps allongé et sa grande tête, fendue d'une large
bouche, c'est un prédateur habitué à la nage rapide dans les eaux agitées, même
s'il apprécie, de temps à autre, le calme des étangs littoraux.
"Dans
les remous du raz de Sein, à la marée descendante, les bars se cachent derrière
une crête rocheuse et attendent les crevettes, les crabes et les maquereaux,
emportés par le courant, raconte Ronan Thomas. Parfois, je vois des petits
poissons venir se coller à la coque du bateau, malgré le bruit du moteur, comme
s'ils étaient terrifiés et cherchaient une protection."
A l'image des bars, qui nagent en banc et
chassent en meute, les ligneurs, à bord de leurs embarcations, ont tendance à
pêcher en groupe. Question de sécurité, car les bateaux peuvent chavirer, mais
aussi de caractère.
"Les ligneurs sont des solitaires,
mais ils échangent beaucoup d'informations entre eux, remarque Gilles Bernard,
secrétaire général de leur association. Celui qui réalise une
bonne pêche peut être tenté, le lendemain, de retourner au même endroit tout
seul.
Mais il peut aussi partager le tuyau avec
deux ou trois collègues, qui le feront profiter, plus tard, de leurs propres
trouvailles. Au bout du compte, ce genre de coopération est plus avantageux. En
fait, ils me font penser à une meute de loups : ils sont parfois très mordants
les uns avec les autres, mais ils ont besoin de chasser ensemble."
Depuis le
début des années 1990, les ligneurs professionnels de la pointe de Bretagne
marquent leurs poissons avec une étiquette orange : d'un simple clic sur
Internet, l'acheteur peut vérifier le nom du pêcheur qui a rapporté le
poisson.
Cette
trouvaille a permis de mieux distinguer le bar pêché à la ligne du poisson
d'élevage, ou pêché au filet. Mais ce n'est pas qu'une simple trouvaille de
marketing. Car rien ne remplace un bar sauvage... L'explication tient, en
particulier, aux conditions de mort de l'animal. Variables selon les techniques
de pêche, elles jouent un rôle essentiel dans le goût.
Une pêche
au filet par un chalutier, par exemple, dure environ trois ou quatre heures. Un
poisson capturé ainsi se débat longuement, parfois dans la vase et les pierres.
Les bars, avec leurs épines dorsales
aiguisées, se blessent entre eux. Or il en va des poissons comme des boeufs à
l'abattoir : un coup de stress, avant la mort, altère la saveur de la chair. Pêché à
la ligne, en revanche, l'animal est capturé vivant. A peine est-il remonté que
les ligneurs le saignent, afin de le faire mourir rapidement, puis lui vident
l'estomac à l'eau, si nécessaire, avant de l'envelopper dans un film de
plastique, ou de le couvrir de glace et d'une toile de jute, pour éviter qu'il
soit au contact de l'air.
"Chaque
pêcheur a sa propre technique, mais c'est un aspect essentiel de leur activité,
souligne Gilles Bernard. Ceux qui travaillent trop vite sont sanctionnés par
les mareyeurs, qui achètent moins cher les poissons traités avec peu de
soin."
De la ligne à la canne
Depuis quatre ou cinq ans, les ligneurs de la
pointe de Bretagne font le même constat que tous les pêcheurs de bar : les
poissons se raréfient et le poids moyen de chaque animal tend à diminuer.
Confrontés à une baisse de leur chiffre d'affaires, les ligneurs multiplient
les sorties en mer et, surtout, adoptent les techniques des plaisanciers. Les
voici devenus fans des cannes à pêche en fibre de carbone et incollables sur
les vertus du fil à pêche tressé. Autant d'accessoires longtemps associés aux
touristes argentés, mais désormais indispensables pour débusquer le bar...
un bar de ligne à la croûte de sel... il n'y a pas meilleur !
RépondreSupprimerj'observe souvent ces "ligneurs" lorsque je me balade à la pointe du Van (plus tranquille que celle du Raz)
Miam! Miam!Miam! J'ai eu la chance de les observer à bord du bateau qui m'amenait passer la journée sur l'île de Sein par temps calme mais pas pour eux. Il y en a un qui est venu nous amener du poisson à livrer sur l'île Impressionnant : courant, vagues, tourbillons en prime rochers et hauts fond de partout déjà pour nous il fallait vraiment connaitre alors pour eux!!!!!!!
SupprimerBelle passion que la votre et Chouette article, bravo
RépondreSupprimerwww.ligneursdurazdesein.fr